Abbaye de Chaalis - 05/06/2019
Abbaye de Chaalis
Le 5 juin 2019 malgré le temps pluvieux quatorze de nos amis ont embarqué à la Porte de Clignancourt dans l’autocar de la Savac pour aller découvrir les trésors de l’Abbaye Royale de Chaalis située à Ermenonville face à la Mer de Sable rendue célèbre par Jean Richard dans les années 1960 et qui a ravi plusieurs générations d’entre nous.
D’emblée se dressent devant nous les vestiges de l’Abbaye qui trône au milieu du parc de trente hectares au charme bucolique.
Notre promenade a commencé par un circuit au sein des ruines majestueuses de l’Abbaye Royale de Chaalis, l’une des plus importantes Abbayes cisterciennes du Royaume de France fondée par Louis VI le Gros au XIIème siècle qui connut une grande prospérité économique et un rayonnement spirituel remarquable tout au long du Moyen-Age. Les terres agricoles qui s’étendent sur plus de 100 kilomètres alentour sont fertiles ; les poissons élevés dans les dix hectares d’étangs sont vendus à prix d’or sur les marchés et constituent d’importantes sources de revenus pour le domaine. En outre, les moines y déploient une intense activité culturelle et spirituelle notamment les moines copistes qui ont contribué à perpétuer les écrits et sciences de toutes natures. Du fait de la proximité de Paris, de nombreux théologiens fréquentent Chaalis. Le roi Saint-Louis très pieux est aussi un habitué des lieux.
A la Renaissance, le cardinal Hippolyte d’Este Premier Abbé nommé par François 1er a fait venir à Chaalis des artistes italiens de grand renom tel Primatice qui va notamment décorer la Chapelle Abbatiale Sainte-Marie construite sous Saint-Louis. Nous y avons à notre tour fait une pause pour admirer les célèbres fresques de l’artiste et les vitraux qui ont retrouvé tout leur éclat depuis 2006.
Au XVIIIème siècle, le petit-fils du Grand Condé demande à l’architecte Jean Aubert d’édifier de nouveaux bâtiments abbatiaux. Les constructions médiévales sont alors mises à bas mais le nouvel édifice classique ne sera qu’en partie édifié faute de crédits.
Vendu comme bien national à la Révolution, le domaine va être restauré dans la deuxième moitié du XIXème siècle par la famille de Vatry très proche de la dynastie royale d’Orléans. Chaalis est alors fréquentée par des musiciens, des peintres et des écrivains comme Gérard de Nerval et Théophile Gautier.
Après avoir parcouru les ruines de l’Abbaye et écouté l’histoire passionnante et imagée du domaine, nous avons rejoint la cafétéria de l’Abbaye de Chaalis où un chaleureux accueil nous a été réservé avant de partager un repas de qualité dans une ambiance conviviale.
En début d’après-midi nous avons traversé le jardin à la française pour aller découvrir la riche palette de couleurs de la roseraie aux quatre-vingt-deux variétés. Elle donne lieu chaque année à une fête au début de l’été qui l’a rendue aussi célèbre que l’Abbaye.
Est arrivé le moment de visiter le château-musée situé dans le grand bâtiment abbatial et qui regorge de trésors accumulés au fil des années ainsi que nous l’a conté notre guide.
En 1902, apprenant que le domaine de Chaalis était à vendre, Madame Nélie Jacquemart veuve du richissime banquier Edouard André revient précipitamment d’un voyage en Asie pour faire l’acquisition de la propriété où elle a séjourné pendant sa jeunesse chez Madame de Vatry et où elle s’adonnait avec passion à la peinture. Elle estimait le bâtiment assez vaste pour y rassembler sa collection impressionnante d’objets d’art, de mobilier, de peintures et de sculptures acquis lors de ses voyages à travers le monde entier. Comme dans son hôtel particulier du boulevard Haussmann elle expose à Chaalis ses trésors : des tableaux de Botticelli et de Giotto, de la vaisselle, du mobilier religieux, une des collections de bustes de Louis XV et de Louis XVI la plus importante de France. Selon la légende, elle aurait acheté en moyenne entre deux ou trois œuvres par jour.
Nous avons admiré une partie de ces trésors en parcourant la grande galerie de soixante-douze mètres, la salle à manger, la salle de billard, le cabinet chinois, la salle orientale et au premier étage les appartements de Madame Jacquemart André.
Nous avons également visité la salle consacrée aux souvenirs de Jean-Jacques Rousseau qui pendant les dernières années de sa vie avait été l’invité du Marquis de Girardin dans le village voisin d’Ermenonville. Le fils du marquis avait constitué une importante collection d’objets et documents en lien avec le philosophe.
L’autre partie des collections de Madame Jacquemart-André était présentée dans son hôtel particulier du boulevard Haussmann qui deviendra le Musée Jacquemart-André de Paris.
L’originalité des lieux résidait dans leur modernité; Madame Jacquemart André avait en effet fait installer une centrale électrique dans le moulin du domaine. Elle permettait dès 1903 d’alimenter en même temps les 360 ampoules du château et de faire fonctionner l’ascenseur.
A son décès en 1912, elle sera inhumée selon sa volonté dans la chapelle de Chaalis. Son effigie sculptée en bronze y orne sa tombe.
Madame Jacquemart-André a légué tous ses biens à l’Institut de France ainsi que la totalité du domaine de Chaalis. En 1924 le fonds Jean-Jacques Rousseau a été acquis par l’Institut de France.
En terminant à regret cette visite nous comprenons pourquoi sa dernière propriétaire Nélie Jacquemart-André décrivait ce lieu classé dorénavant monument historique comme « un des paysages les plus admirables de France ».
Hélène Barthon